Après X. Noël et J.J Argueyrolles, voilà un article sur une autre innovatrice en dorure à la feuille : Manuela Paul-Cavallier.
Celle-ci se définit, non pas comme doreuse, mais comme « créatrice de matières d'or », artisan et artiste à la fois, dont le savoir-faire n’est autre que la conjugaison subtile de l’artisanat, de l’art et des feuilles d’or. De formation classique, M. Paul-Cavallier est issue de l’université d’histoire de l’art de Florence, puis a intégré une école de décoration en Toscane, d’où elle sort diplômée en dorure sur bois.
Après un parcours en restauration de 25 ans, elle se tourne vers la décoration contemporaine (comme en atteste son récent travail à l'Hôtel Intercontinental du Grand Hôtel-Dieu de Lyon) ainsi que la création personnelle. Ce parcours singulier l'amènera d'ailleurs à être Lauréate de la Villa Kujoyama en 2014 au Japon, où elle a été initiée au geste par des maitres de l’épure.
Ces différentes facettes du métier se nourrissent l'une-l'autre : les diverses collaborations (ex : le Petit Théâtre de Lumière) et les travaux de commande (ex : les flacons du parfum Opium de Yves Saint-Laurent) engagent une recherche technique et un savoir-faire qui, en retour, sont terreau d'inspiration pour les créations artistiques. Les frontières sont poreuses et les ponts sont bien là.
«J’aime l’impression, l’émotion des équilibres, du mouvement, les sensations que font naître les zones d’ombre, la profondeur parfois insondable du noir, seulement rompu par la feuille d’or ou un contraste de mat et de brillance. La lumière se détache des ténèbres. L’équilibre de l’ombre et de la lumière, leurs complémentarités ou leurs oppositions, ces mouvements que la matière reçoit et restitue à celui qui la parcourt du regard. Même les figures d’apparence statique impriment le mouvement de leur relation dans l’espace. »
Manuela Paul-Cavallier a pris le temps de décortiquer la dorure pour n'en garder que son essence, les bases fondamentales : l'alchimie des techniques, les gestes de la main, la lumière, l'espace et le rapport aux matières.
Elle tend à cheminer sur les mêmes sentiers que Pierre Soulages et Françoise Verdier. M. Paul-Cavallier a pour volonté de travailler l'or de manière contemporaine : le relief, les fissures, les supports accidentés ont sa prédilection (héritage de son passé en restauration ?). Goût que l'on retrouve également dans ses choix graphiques : les arabesques et calligraphies dont les traces rappellent des fissures/les cernes/les écorces de bois, voire certains cuirs.
Les possibilités offertes par tous les ors (jaune, blanc, moongold) ne sont pas oubliées, tout comme les infinies subtilités qu'ils permettent, une fois les techniques de brunissage et de patine maitrisées : or ostentatoire, or poétique, or délicat... Enfin, toutes les matières sont explorées : papier, vieux bois, verre, bambou, toile, cuir, pierre, paille (collaboration avec Lison De Caunes), tout en conservant ce style unique caractérisé par des jeux de matières, une alliance pigments (noirs) et feuilles d'or, et de textures mat/brillance... ses fameux reflets d'or.
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