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Jean-Jacques Argueyrolles, de rouille et d'or

Argueyrolles, créateur de mobilier et de décoration ... tout de métal et d'or.


Jean-Jacques Argueyrolles (1954) est-il un sculpteur tout court ? un sculpteur de meubles ? un designer ? un doreur ? un forgeron ? un ferrailleur ? Tout ça à la fois et puis, au fond, on s'en moque bien. Ce qui nous intéresse particulièrement ici, c'est la manière dont il combine l'or et le métal dans son mobilier. Mobilier qu'il développe en parallèle à une activité de sculpture dans son actuel atelier de Nègrepelisse (82).

Autodidacte, et pas peu fier de l'être, Jean-Jacques Argueyrolles s'est initié à la sculpture dans un atelier de quartier. Le fer d'abord, puis le bronze, ainsi que la photographie. Cette approche artistique, couplée à une passion pour les voyages (la famille Argueyrolles vit la moitié du temps en Asie) se ressent dans le mobilier design et minimaliste qu'il créé. Décorateur de l’hôtel Alpha, de l'Hôtel Pavillon Opéra Grands Boulevards et du restaurant 1728 à Paris (désormais fermé), il crée aussi bien des sculptures monumentales abstraites (Pondichéry 2007), que des sculptures plus "figuratives", que des fontaines en granit...

Au niveau des types de meubles, rien ne lui a échappé : consoles, appliques, fauteuils (proches de trônes), banquettes, secrétaires, sofas, tables basses, tables de chevets, buffets, caches-radiateurs, vases... Certains portent des noms plus qu'évocateurs, tels "la chaise ailée", la "console lézard", la "table corne" ou le "fauteuil buffle".

Influencé par Tapiès (jeu des matières et des textures), l'art baroque, l'art nouveau, les arts dits "premiers" et les arts asiatiques bien sûr, son art, est souvent qualifié (étrangement) de "brutaliste". Pour moi il déborde de dérision, de finesse et surtout d'un grand sens de l'observation de l'humain, de sa culture et de la nature.

Le métal est là et bien là : très présent, massif mais froissé, tordu, plié, ondulé, creusé-gravé, brut/astiqué/patiné. Ainsi... nous sommes sans arrêt dans le renversement, en particulier au niveau des pieds. En effet, ce qui porte, ce qui rattache au sol, est certes extrêmement solide/massif, et en même temps gracile (comme les éléphants dans les peintures de Dali, ou les sculptures de Giacometti) : les pieds des tables sont creux/évidés et se terminent en fines pointes, telles des pattes d'insectes. Il semble qu'elles vont se mettre à marcher !

Pour certains fauteuils-trônes ou canapés, les pieds pourraient toucher le ciel et se terminent parfois par des cornes. Enfin certaines commodes, telles Mona Lisa, ont des yeux qui nous suivent...

Ainsi ces meubles de métal (sortis donc de terre) me paraissent littéralement habités, ils sont animistes.


Mais quelle est donc la part de l'or (autre métal) dans cette histoire ? L'or est très souvent présent dans son mobilier et il est intéressant d’étudier la place raffinée qu'il occupe dans ce jeu avec le brutal fer/bronze (je vous livre ici mon ressenti n'ayant rien trouvé d'écrit de sa part à ce sujet). Quelquefois brillant, souvent patiné, il est utilisé pour mettre en valeur des points précis : les nombreuses pointes de flèches par exemple, ou encore les différents disques.

De même, l'or est souvent positionné sur ce qui porte, sur les angles et sur les bords : il semble donc apporter un supplément de puissance et de force aux pieds, ou de la profondeur lorsqu'ils sont creux. A contrario, il peut donner du rythme à la pièce métallique, en cassant les angles d'une console par exemple.

L'or a une présence rassurante et confortable en enveloppant (comme dans les fauteuils club et buffle), en protégeant là où le corps se re-pose (accoudoirs, dossiers, assises) ou en venant "couronner" les têtes. On dirait presque qu'il répare, que les pièces métalliques sont rafistolées, rapetassées avec des pans d'or.

L'or apporte aussi une pointe d'humour et un rajout de signification, lorsqu'il devient "yeux de commodes".

Parfois, il souligne également la texture du métal en en faisant ressortir le caractère granuleux, ou il s'harmonise avec lui par un jeu de patines en camaïeu, soit il contre son côté sombre en apportant des points de lumière.

L'or permet encore à J-J. Argueyrolles de composer de véritables tableaux abstraits (sur les tables basses notamment), il est alors une "simple" couleur.

Enfin, pour terminer sur la part du symbolique et du spirituel : comment ne pas penser aux statues de Bouddha, et surtout aux offrandes d'or , à ces petits carrés d'or délicatement posés afin de rendre hommage à des divinités et de s'en attirer quelques bienveillances ?


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